Les îles font rêver par les sensations qu’elles inspirent et les images idylliques qui s’en dégagent. Mais ces bouts de terre sont aussi un concentré de risques potentiels et de catastrophes naturelles avérées qui, chaque année, font la Une des médias. C’est la malédiction du paradis.
Mère Nature est décidément intraitable! Ce qu’elle donne d’une main, elle le reprend souvent de l’autre. Ainsi en est-il pour les îles, ces destinations souvent paradisiaques qui peuvent, au gré des événements naturels, basculer rapidement dans le chaos.
Et l’actualité ne nous contredira pas ! Ces dernières années, nombre d’entre elles ont subi des assauts rageurs : inondations et coulées de boue, séismes, épidémies de chikungunya et de dengue, tsunamis même parfois. Si pareils événements frappent les continents, on observera que « sur terre », leurs répercussions économiques et psychologiques sont moins négatives.
L’insularité exacerbe nos attirances… et nos craintes
D’abord, parce que l’économie des îles est fragile et repose souvent sur l’industrie touristique. Ainsi, Madère en tire 30 à 35% de son PIB. Autant dire que le moindre événement peut avoir une incidence catastrophique.
Et puis, si les îles font rêver par leur isolement et leur éloignement, ces attraits peuvent – au moindre problème – devenir des handicaps majeurs.
« L’insularité exacerbe nos sensations et nos perceptions environnementales. Elle confère à tout événement météorologique, médical ou tectonique, une dimension cataclysmique, même s’il est mineur. Notre inconscient individuel et collectif ne perçoit alors plus l’île comme un espace de liberté, de détente, de ressourcement, voire de protection à un monde extérieur hostile, mais comme une véritable prison. Une perception d’enfermement, d’isolement, de vulnérabilité, d’abandon, ressurgit instinctivement. L’insularité apparaît alors comme un piège, une entrave à notre instinct de survie, à nos facultés à échapper à une situation périlleuse fantasmée ou réelle. Ce ressenti primaire marque nos esprits, imprime notre inconscient, que nous en soyons victime ou simple spectateur », analyse le psychanalyste Jo Friedman.
Des images spectaculaires à double tranchant
Et c’est ainsi que de nombreuses îles voient leur image idyllique régulièrement balayée par les événements naturels parfois mineurs. À chaque fois, elles devront se reconstruire une « virginité » pour rassurer leurs futurs visiteurs. Le cas de la Réunion est de ce point de vue exemplaire. Si les éruptions volcaniques du Piton de la Fournaise constituent une véritable attraction touristique, il n’est finalement pas certain qu’elles ne portent pas préjudice à la destination. Les images de torrents de lave s’impriment dans l’esprit du public et peuvent détourner, consciemment ou non, ceux qui ne savent qu’il s’agit-là d’un événement exceptionnel, spectaculaire et magnifique à voir. Les non avertis estimeront alors: « On ne va pas passer des vacances sur une île volcanique avec les risques que ça présente ». Même s’il n’en est rien sur place.
Une récurrence de phénomènes telluriques et cycloniques
Cependant, il nous faut admettre que les îles présentent un fort potentiel de risques naturels.
« À commencer par leur localisation dans des zones météorologiques et tectoniques très actives (1). Cette combinaison a pour conséquence une récurrence de phénomènes volcaniques, telluriques et cycloniques majeurs », constate le géographe Michel Descamps.
De grandes destinations touristiques insulaires sont dans cette configuration, comme les Antilles, les archipels indonésiens, philippins… D’autres pourraient bien être menacées par la montée des océans (si elle se confirme), comme les Maldives, les Seychelles. Ou le sont déjà par les tsunamis, comme le Sri Lanka, les îlots thaïlandais. Certaines, enfin, semblent particulièrement vulnérables aux phénomènes épidémiques de types chikungunya ou dengue (grippe tropicale), comme les Comores ou La Réunion.
Alors, ces îles qui font tant rêver ne seraient-elles pas aussi paradisiaques que nous l’affirment les brochures des voyagistes ? Disons qu’elles sont victimes d’un incomparable potentiel de fascination finalement très fragile. Au moindre problème, leur image vole en éclat.
Si la beauté se paie au prix fort, le paradis se mérite… toujours.
(1) Zones où se chevauchent les grandes plaques qui composent l’écorce terrestre, donc soumises à de fréquents tremblements de terre.
© Texte & Photos - Toptrip.tv
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